Pour ce nouveau témoignage, je suis vraiment très contente de vous présenter celui de Fabrice, officier de la marine marchande de 36 ans, qui non seulement est végane mais aussi activiste dans l'ONG Sea Shepherd Global.
- Peux-tu expliquer en quoi consiste ton engagement en faveur des animaux ? Depuis combien de temps as-tu commencé ?
A
un niveau personnel, mon engagement c'est d'abord être végan, donc,
d'avoir changé mes habitudes de vie et de consommation. C'est
répondre aux questions de mon entourage à ce sujet, exposer mes
raisons, ou essayer de leur faire découvrir des documentaires. Comme
j'ai des enfants, j'essaie aussi de les sensibiliser et de les
intéresser à mes recettes de cuisine. En ce qui concerne mon
activité, je m'investis dans une ONG d'action directe, Sea Shepherd
Global, dont le but est de sauver des animaux marins ( des baleines
aux concombres de mer), et qui fait également la promotion du
véganisme.
- Quelles sont les raisons qui t'ont motivé ?
On
pourrait appeler ça un mouvement de révolte de voir aussi bien les
gens que nous sommes, que les animaux que nous élevons, traités
comme de vulgaires marchandises. Tout est sacrifié au profit. C'est
triste pour nous comme pour les vaches. Quand je vois les porcs
engraissés et conduits à l'abattoir, je vois Dupond gavé de fast
food qui donne son temps et sa vie pour le bénéfice de sa
compagnie. Je suis choqué de l'absurdité, du manque de liberté, de
la laideur de notre société. C'est donc parce que je me sentais
contraint, prisonnier d'une vie dans laquelle je ne me reconnaissais
pas, que j'en suis venu par étapes au véganisme. J'avais besoin
d'un rapport à mon environnement radicalement différent. Pour
résumer, j'ai trouvé qu'il y avait plus de respect de soi et des
autres, plus de bon sens, plus de joie de vivre, plus de
satisfaction, plus l'amour surtout et moins d'isolement à envisager
les choses selon une perspective végane. Nous ne pouvons pas nier
les animaux sans nous renier nous-mêmes. Envisager la vie dans toute
sa beauté et son essence, c'est repenser la place de l'homme parmi
les êtres vivants.
S'intéresser aux animaux c'est s'intéresser aux oubliés, et
j'avais l'impression que nous étions tous des oubliés.
- Depuis combien de temps es-tu engagé au sein de Sea Shepherd ? Qu'y fais-tu ?
J'ai
rejoint Sea Shepherd il y a 3 ans, d'abord comme bénévole à terre,
pour des événements de sensibilisation et de collecte de fonds. Il
y a 2 ans, j'ai embarqué aux îles Samoa sur le Brigitte Bardot,
comme chef mécanicien. Le but du navire à cette époque était de
protéger le fondateur de l'ONG, Paul Watson, qui faisait l'objet
d'une notice rouge d'Interpol. On se faisait discret donc, pendant
que la justice suivait son cours, jusqu'à ce qu'on puisse enfin
débarquer Paul Watson en toute sécurité à Los Angeles.
Par la suite, j'ai été capitaine sur le Jairo Mora Sandoval (du nom d'un écologiste costaricien qui s'est fait assassiner, et dont les meurtriers ont échappé impunément à la justice). Ce bateau était au Sénégal, pour une campagne contre la pêche illégale, menée de concert avec les autorités du pays. Mais ces autorités corrompues se sont vite retournées contre nous. Après les menaces des militaires, donc, après qu'ils sont venus à notre bord de nuit pour nous voler du matériel, après aussi qu'ils avaient incendié un navire d'une asso locale qui collaborait avec nous, nous nous sommes finalement réfugiés aux îles du Cap Vert.
Depuis un an, nous y travaillons en partenariat avec d'autres associations locales de protection de l'environnement à l'étude et au recensement de certaines espèces endémiques de ces îles. Nous avons également mené campagne pour la protection des tortues de mer.
Avec de la chance, j'aimerais participer à la prochaine campagne aux îles Feroés cet été, contre le massacre "rituel" des baleines pilotes.
Par la suite, j'ai été capitaine sur le Jairo Mora Sandoval (du nom d'un écologiste costaricien qui s'est fait assassiner, et dont les meurtriers ont échappé impunément à la justice). Ce bateau était au Sénégal, pour une campagne contre la pêche illégale, menée de concert avec les autorités du pays. Mais ces autorités corrompues se sont vite retournées contre nous. Après les menaces des militaires, donc, après qu'ils sont venus à notre bord de nuit pour nous voler du matériel, après aussi qu'ils avaient incendié un navire d'une asso locale qui collaborait avec nous, nous nous sommes finalement réfugiés aux îles du Cap Vert.
Depuis un an, nous y travaillons en partenariat avec d'autres associations locales de protection de l'environnement à l'étude et au recensement de certaines espèces endémiques de ces îles. Nous avons également mené campagne pour la protection des tortues de mer.
Avec de la chance, j'aimerais participer à la prochaine campagne aux îles Feroés cet été, contre le massacre "rituel" des baleines pilotes.
- Ton véganisme découle-t-il de cet engagement ou est-ce l'inverse ?
Les
deux. Je me suis d'abord engagé pour l'écologie, puis plus
précisément pour la cause animale. Suite à ça je suis devenu
végétarien pendant deux ans, et seulement après végan. Mais d'un
autre côté, on peut dire que ce changement de choix alimentaires a
contribué à développer ma sensibilité, et à renforcer mon
engagement.
- Comment as-tu procédé, par étape en éliminant certains aliments ou directement en adoptant l'alimentation végéta*ienne ?
Quand
je suis devenu végétarien, ça a été d'un coup. J'ai
immédiatement banni la viande et le poisson, et cela ne m'a plus
jamais manqué. En revanche, je suis devenu végétalien plus
progressivement. La raison, c'est qu'en devenant végétarien,
j'avais d'abord cru que c'était suffisant et qu'aller au delà
serait se montrer plus royaliste que le roi. Ensuite j'avais une
mauvaise image des végans qui m'énervaient à se montrer trop
moralisateurs, ou tatillons, par exemple, en rechignant à se servir
d'un couteau qui avait déjà servi à beurrer une tartine.
Néanmoins, en continuant à me documenter sur l'élevage, j'en suis
venu, sans me forcer, à bannir aussi le lait, le fromage et les
oeufs. Pendant une période, je consommais encore quelques produits
auxquels j'étais « accro », comme les sauces à émulsion
(mayonnaise, béarnaise etc...) qu'on trouve en supermarché, et la
crème fraîche que j'avais autrefois l'habitude de manger à la
petite cuillère. Grâce à la découverte de nouvelles recettes,
j'ai finalement arrêté d'acheter ces produits aussi.
- Quelle est ta recette et/ou ton produit végéta*ien préféré ?
Le
seitan, cuit au four dans sa marinade avec de la purée, ça me rend
fou !
- Ton entourage partage-t-il tes convictions ? Participe-t-il avec toi ?
Quand
j'ai expliqué à ma femme que je souhaitais ne plus manger de
viande, elle a aussitôt appelé nos deux filles (de 8 et 6 ans) dans
la cuisine pour leur annoncer la nouvelle, d'un ton très grave et
solennel. Les enfants se sont aussitôt mis à pleurer. J'étais
vraiment dépité par cette scène que je n'avais pas anticipée. Par
la suite, c'est resté difficile avec ma femme. Elle a réduit sa
consommation de viande, mais trouve exagéré de devenir végétarien,
et m'a reproché, classiquement, mon extrémisme quand par la suite
je suis devenu végan. Pour les enfants c'est compliqué. Je leur ai,
depuis, expliqué mes raisons, avec le plus de douceur possible. Je
ne peux pas leur donner une alimentation végétalienne dans la
mesure où il y a un différend sur ce sujet entre leur mère et moi.
Et quand c'est moi qui cuisine, elles endurent avec patience, mais
frustration, le fait qu'il manque une saucisse ou un poisson pané
dans l'assiette.
Beaucoup de mes amis disent que j'ai raison, et donc
qu'ils réfléchissent à la question.
- Une anecdote sympa à nous raconter ?
Je
me souviens d'un barbecue en famille, il y a deux ans. J'étais
végétarien, et pas encore végétalien. Plutôt que des saucisses
ou des côtelettes, je me suis fait fondre un camembert sur les
braises. Ça a rendu jaloux tous les baffreurs de viande qui m'ont
boulotté mon camembert avant de revenir à leur assiette.
- Enfin, quel(s) conseil(s) et/ou quel(s) message(s) aimerais-tu faire passer ?
Je
n'ai jamais autant apprécié le fait de manger que depuis que je
suis végan. J'ai découvert tant de saveurs, et de nouvelles façons
de cuisiner ! Par ailleurs, je cuisine beaucoup plus moi-même,
et apprécie d'autant plus le moment du repas, si je peux partager ce
que j'ai fait. Par le plaisir que j'ai à essayer de nouvelles
recettes, et la détente que ça me procure, je me rends compte que
cuisiner n'est pas perdre son temps mais le consacrer, vraiment, à
quelque chose d'essentiel.
Je me sens plus vivant.
Merci beaucoup Fabrice !
(Entretien réalisé par mail)
Joli témoignage, j'en ai noté quelques phrases dans un carnet.....Scènes fortes et drôles aussi...Bravo et merci pour votre engagement.
RépondreSupprimerPascale